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Manon 4 min

Et (Peter) Pan !

Peu convaincue par la dernière version de Peter Pan, adapté à l’écran par Joe Wright, j’ai eu envie de combler ma frustration en revenant sur l’histoire d’origine à travers le bel album paru aux éditions Milan le 4 novembre dernier ; celle de J.M. Barrie, illustrée par Alexandra Huard et traduite et adaptée par Maxime Rovere.

 

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Pan VS Peter Pan

Dans l’adaptation un peu farfelue de Joe Wright, Peter Pan est un petit garçon orphelin, enlevé au Pays Imaginaire pour y devenir le héros annoncé par la prophétie : il lui faudra déjouer les plans de Barbe Noir, notamment dans le but de retrouver sa mère.

Qu’en est-il de l’histoire d’origine ? Pour rappel, Peter Pan a été publié dans le roman The Little White Bird de l’auteur écossais J.M. Barrie en 1902 (!). Dans cette version d’origine, notre héros éponyme est bien ce petit garçon qui ne veut pas grandir. Ayant perdu son ombre, il trouve dans la maison de M. et Mme Darling, auprès de Wendy, le nécessaire pour la rapiécer. Ainsi fait-il la connaissance de la jeune fille et de ses frères, John et Michael, qu’il convainc d’emmener au Pays Imaginaire (appelé « Pays du Jamais » chez Milan), afin que toujours, ils demeurent des enfants. Ils y vivront des aventures palpitantes, accompagnés des garçons perdus, que le ton et les couleurs de cet album illustrent avec brio.

 

Un récit en clair-obscur

Entre graphismes modernes et traditionnels, riches en couleurs et aux tonalités oniriques, l’ouvrage nous en met plein la vue. Par des double-pages qui nous immergent dans le lagon des sirènes (aux allures des vahinés peintes par Gauguin), dans les nuits étoilées du pays du Jamais ou encore dans le repère des enfants perdus, et par un récit coloré par une tonalité dynamique, ce livre fait tout simplement sourire son lecteur par la gaité qui s’en dégage. À ce rythme engageant, s’ajoute la voix entraînante du narrateur, déjà présente dans l’œuvre d’origine, qui ne laisse jamais son lecteur de côté. Ainsi débute-t-il le chapitre sur « Le Lagon des Sirènes » :

« Si vous fermez les yeux et que vous appuyez un peu dessus, vous pourrez voir avec un peu de chance une tache aux couleurs vives : c’est le lagon. Vous n’en approcherez jamais plus depuis le monde réel, sauf à votre dernier moment. »

 

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Et le récit en lui-même rallie facilement le lecteur, par l’humour dont il est imprégné. C’est le cas au moment où Wendy arrive au pays du Jamais : Clochette, jalouse de son amitié avec Peter, ment aux enfants et prétend qu’il leur ordonne de tirer sur la jeune fille. N’ayant pas l’habitude de croiser des adultes, les enfants la confondent avec un oiseau, que l’on appelle aussi wendy ; ce qui donne à lire, au moment où la jeune fille tombe du ciel : « Tirez sur le wendy, c’est Peter qui l’ordonne ! », ou encore « le wendy bouge ! ». Parfois même, l’humour frôle l’absurde, comme le prouve l’attitude plutôt surprenante de Mr. Darling, le père des trois enfants…

« En effet, M. Darling avait fini par comprendre que Nana était depuis toujours beaucoup plus avisée que lui. […] Mû par un noble sens de la justice, il avait pleinement reconnu le mérite de Nana et, rongé par le remords, avait décidé de ne plus marcher qu’à quatre pattes et de ne jamais quitter la niche. […] Tous les matins, un taxi venait le chercher pour le transporter, dans sa niche, jusqu’à son bureau, et il le ramenait le soir. »

 

« La deuxième étoile à droite, et tout droit jusqu’au matin »

C’est finalement un récit plutôt traditionnel, proche du conte, que j’ai découvert à travers cette jolie version, emprunts de conventions que l’on imagine d’autant plus actuelles à l’époque de sa parution, au début du XXe siècle : Wendy, devenue provisoirement la mère des enfants perdus, est une mère stricte et leur enseigne la rigueur. Bien souvent, le récit est poétique : la fée Clochette s’exprime ainsi dans « une langue pleine de tintements », tandis qu’au début du récit « les étoiles, qui les regardaient [Peter, Wendy et ses frères] du dehors, soufflèrent sur la fenêtre pour l’ouvrir, au même endroit où M. et Mme Darling rentraient de leur dîner. » Les images qui inondent cet ouvrage, en mots ou en dessin, nous emmènent bel et bien dans un pays de l’imaginaire.

Qui est Peter Pan, vous demandez-vous encore ? Lui-même ne saurait mieux se présenter : « Je suis la jeunesse, je suis la joie, je suis le petit oiseau qui vient de briser sa coquille ».

Attention, à la fin de cet album, vous pourriez bien avoir envie de redevenir enfant !

 

Prix : 16,90 €

A partir de 8 ans

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