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Manon 6 min
Doux comme un mouton !
Aujourd’hui, réunissons petits et grands autour d’un ouvrage qui devrait séduire même les cœurs les plus endurcis d’entre vous. La nouvelle saison approche, et le petit livre de Léontine Soulier arrive à point. Découvrons ainsi Comment tu m’aimes ?, cet album tendre et amusant publié en autoédition début 2016.
Léontine Soulier par Lisons jeunesse
Sous son format minuscule et pratique, ce livret-album conçu par Léontine Soulier n’en est pas moins pourvu de pépites, bien au contraire. Irriguée par une même question, chaque double-page répond au titre : « Comment tu m’aimes ? ». Les réponses ne sauraient décevoir les enfants qui aimeront se souvenir de cette joie incomparable devant l’acquisition d’un nouveau cartable, imaginer la douceur d’un mouton… ou se souvenir de cette sensation bienfaitrice de crème sur un coup de soleil à laquelle nous sommes tous plus ou moins accoutumés (plutôt plus que moins pour ma part…).
Les plus grands y trouveront également leur compte, familiers de ces petites futilités quotidiennes qui pourtant nous ravissent lorsqu’il nous arrive de les rencontrer. Je pense à « ce bain chaud quand on a les pieds froids », « ce vent frais dans la nuque une chaude journée d’été » et à ces sensations toutes simples, plus concrètes encore, que sont cet « oignon qui ne fait pas pleurer », cette chaussette toujours manquante, ou, un peu moins connue cependant (mais après tout, à chacun son petit plaisir) cette « une grenouillère devant un feu de cheminée » qui donne envie de s’y essayer. Je n’en dis pas plus, à vous de découvrir la suite de ces doux sentiments que l’on se remémore au fil des pages de Léontine Soulier.
Par ses illustrations, mélanges de couleurs chaudes et fleuries à l’image des mots qu’elle a choisis, l’auteure nous offre une lecture agréable, emplie de petites impressions inattendues et pourtant familières et amusantes. Armée de crayons de couleurs, d’aquarelle et d’encre, entre autres, la plume de Léontine Soulier m’a plu par sa délicatesse, le grain de folie et l’atmosphère véritablement chaleureuse qui émane de l’ouvrage.
Mais laissons plutôt la parole à l’auteure / illustratrice que je suis ravie d’avoir rencontré, et que je remercie d’avoir pris le temps de répondre (malgré une grippe carabinée) ! Vous pouvez en cas tout d’ores et déjà obtenir son ouvrage juste ici.
Léontine Soulier par Léontine Soulier !
Comment est née l’idée de ce livre ?
L’idée est née d’un jeu avec mon amoureux de l’époque. Je lui demandais comment il m’aimait et il devait trouver de jolies métaphores pas trop niaises. Au bout d’un moment on a commencé à en avoir pas mal, et j’ai eu envie de les mettre en image.
Combien de temps as-tu mis pour réaliser ton ouvrage ?
Entre la naissance de l’idée et la réalisation il a dû se passer deux ou trois ans je pense.
Le temps de récolter les phrases. Ensuite, j’ai gardé l’idée au chaud quelques mois, j’ai essayé à plusieurs reprises de dessiner, mais j’ai eu un petit blocage pendant quelques temps. Les illustrations ne me convenaient pas, et un jour, je m’y suis remise, j’avais trouvé une direction visuelle qui me plaisait. Je ne me suis pas arrêtée pendant trois jours. J’ai réalisé environ une quarantaine d’illustrations. Au final, j’en ai sélectionné une vingtaine. Ensuite il y a eu ce temps de mise en page, de recherche de l’imprimeur qui avait LE papier que je voulais. Le lancement du crowdfunding. Et un jour, des cartons remplis de MON livre était devant ma porte !
De quelle façon as-tu procédé pour concevoir tes illustrations ?
J’ai commencé à dessiner avec des feutres à alcool, sur du papier layout. C’est un papier très très fin, un peu transparent, j’aimais bien cette fragilité, je trouve qu’elle colle bien avec le projet. Ensuite, j’ai testé des mélanges avec de l’aquarelle, de l’encre, du stylo noir et des crayons de couleurs. J’aime bien travailler avec des tâches d’encre. Les laisser se glisser dans une goutte d’eau ou d’aquarelle, les voir se diffuser et les retravailler ensuite au crayon.
De quelle formation es-tu issue ?
Je suis passée par l’Université, Arts Visuels à Strasbourg. À la fac, j’étais plus portée vers la vidéo/photo. Ensuite en master j’ai commencé l’animation, et du coup à dessiner un peu plus. C’était tellement magique pour moi de pouvoir dessiner des personnages et de les voir s’animer ensuite, tout était possible ! C’est pour ça que j’aime dessiner, animer. On peut tout inventer. « Quoi ? Ce personnage n’a pas un physique qui serait viable dans la vraie vie ? Et alors ?!! »
Était-ce difficile de se lancer dans l’autoédition ?
Pas nécessairement, mais ça demande beaucoup d’énergie. Il y a un côté très jouissif au final : « j’ai réussi toute seule ! » (même si je n’y serais pas arriver sans mes généreux donateurs).
Je suis passée par une plateforme de crowdfunding. En réalisant mon livre, comme c’était le premier, j’ai pensé qu’il serait peut-être difficile de trouver une légitimité auprès des éditeurs. Et surtout, je ne voulais pas attendre de trouver un éditeur pour le publier. Le point positif des appels à dons, c’est qu’on sait déjà que lorsque le livre sera terminé, un petit public l’attendra, on tâte aussi le terrain.
Une fois qu’il est bel et bien là, ce n’est pas terminé, il faut le diffuser. Bien sûr, la grande machine qu’est internet est bien pratique. Il y a aussi le démarchage dans les librairies qui prend du temps, et pendant ce temps là on ne dessine pas. C’est à la fois frustrant et intéressant d’avoir le retour direct des libraires.
As-tu d’autres projets en cours ?
Pour l’instant pas encore de projets bien définis. Des bribes de projets par-ci par-là, des bribes à approfondir. Des projets d’expositions aussi.
Aimerais-tu nous recommander un livre que tu as aimé ?
Un livre qui se rapproche un peu de l’idée du mien.
Il était mille fois de Ludovic Flamand et illustré par Delphine Perret. http://editionslesfourmisrouges.com/produit/il-etait-mille-fois/
On me l’a offert, et il se confond parfaitement avec une partie de mon univers. Poétique et doux. Mille petites phrases accompagnées d’illustrations qui parlent à tout le monde. Des phrases amusantes, parfois un peu tristes, dans lesquelles on se retrouve tous un peu :
Un tonton qui disait « J’ai volé ton nez »
Un petit pas fatigué qui voulait « juste encore un verre d’eau »
Un garçon qui montrait son zizi aux filles
Quels auteurs et/ou illustrateurs t’inspirent ?
Il y en a beaucoup ! Ça évolue beaucoup aussi, tous les jours j’en découvre d’autres !
Je vais essayer d’être exhaustive.
Il y a Victoria Antonili.
Ce que j’apprécie dans son travail, c’est le mélange des techniques. Le dessin n’est pas parfait, les jambes sont parfois trop grandes, mais il quelque chose qui me touche. On ressent bien l’émotion des personnages.
J’aime aussi beaucoup Thoka Maer, pour les tonalités qu’elle utilise et la simplicité complexe des illustrations. Elle réalise beaucoup de gifs animés, peu de choses s’y animent, mais ça donne quelque chose de vraiment bien et de souvent très poétique.
Et j’ajouterais qu’il y a une super exposition en ce moment à Strasbourg « Fit to print ». Elle présente des illustrations d’anciens élèves de l’école des Arts décoratifs de Strasbourg qui ont été publiées dans le New York Times. L’occasion de revoir une quelques images de Marion Fayolle dont j’aime beaucoup l’univers et de découvrir le travail de Fanny Blanc qui m’a beaucoup amusé et la légèreté du travail au fusain de Marine Rivoal.
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