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Bérengère 2 min
Conte l'obscurantisme
« Inspiré de faits réels », comme on dit, le prolifique Thierry Dedieu a publié en 2016 Le caillou, un conte court mais très important qui fait réfléchir petits et grands sur l’extrémisme, la tyrannie et la destruction du patrimoine.
Une histoire de cailloux
Un pays imaginaire est envahi par le peuple autoritaire et destructeur des Khomènes. Or dans ce pays, tout au milieu, il y a un grand rocher sacré. Dessus, on peut y lire de très vieilles inscriptions qui racontent l’histoire du Karabastan avant sa conquête. Les habitants viennent s’y recueillir et continuent de l’honorer. Ce rocher est donc « comme un caillou dans la chaussure des Khomènes ». Le guide suprême fait alors détruire le caillou et réduit l’histoire en poussière.
Mais à partir de ce jour, le pays tout entier se met lentement à s’élever au-dessus des autres. Les savants sont incapables d’expliquer ce phénomène, et se font de toute façon trancher la tête. Petit à petit, le pays s’isole.
Un grave gravier
Pour parler de thèmes très difficiles – tyrannie, destruction, mémoire… –, les mots sont rares et les images dures. Présentées en pleine page, les illustrations sont tranchantes. Le noir et le gris dominent, parfois lacérés d’un rouge orangé – celui des envahisseurs qui armes à la main massacrent le peuple, celui du guide suprême qui scrute tout, mais aussi celui du caillou, seule lumière dans ce pays devenu presque désert.
Une leçon lapidaire
Thierry Dedieu frappe encore fort avec cet album sombre et engagé. Inspiré par l’actualité et la destruction des biens culturels en Afghanistan, en Irak et à Palmyre, ce livre parle d’extrémisme, de dictature et souligne l’importance de l’histoire. L’album s’ouvre et se ferme sur ces mots en majuscules, gravés comme une sentence : « Les hommes sans mémoire n’ont pas d’avenir ». Quand on efface le passé semble-t-il indiquer, on est condamnés à s’agiter dans le noir et à subir des décrets brutaux et dépourvus de sens.
À faire lire pour faire vivre la mémoire.
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